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Jeanne d'arc - Vie et procès d'une toute jeune fille

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Message par Vive Dim 5 Mar 2017 - 15:06

Jeanne d'arc - Vie et procès d'une toute jeune fille 260px-Joan_of_Arc_on_horsebackJeanne d'arc - Vie et procès d'une toute jeune fille Jehanne_signature
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Message par Vive Dim 5 Mar 2017 - 15:15

Enfance

Jeanne est née dans la paroisse de Domremy, seigneurie de Bourlémont, dans le Barrois mouvant de la couronne de France, au bord de la Meuse, en 1411 ou 1412. Sa famille était celle d'un laboureur honorablement considéré, bon paroissien, marié à Isabelle Romée, de la paroisse proche de Vouthon, et père de cinq enfant, nommé Jacques, et dont le nom de famille fut à l'époque, comme souvent, diversement compris et orthographié : Darc, Bars, Tart voire d'Ay.

Le curé de la paroisse baptisa la petite fille - la benjamine des enfants - et nous connaissons les noms de quatre parrains et cinq marraines dont certains témoignèrent au procès en nullité. Pendant l'enfance de la fillette les troubles qui déchiraient le royaume n'ont pas épargné le village : en 1423 des habitants, dont Jacques, allèrent négocier et payer la protection de Domremy par Robert de Sarrebruck, seigneur de Commercy, cependant en 1425 un raid bourguignon enlevait les troupeaux des habitants. En effet, la seigneurie avait embrassé le parti de Charles VII, devenu roi en 1422, et elle tint bon, ce qui valut .encore aux habitants une nouvelle incursion ennemie en 1428, qui força la population à se réfugier à Neufchâteau. Il n'est donc guère étonnant que les habitants aient su quelle était la situation du roi Charles, ses alliés et ses ennemis, l'état de ses fidèles : on devait beaucoup en parler à la veillée. La nouvelle de la prise des villes de la Loire et du siège d'Orléans ne dut pas mettre plus de quinze jours à parvenir jusqu'aux bords de la Meuse


Jeanne fut élevée comme toutes les habitantes des campagnes, entre la maison et les champs : couture, filage, cuisine, ménage et participation à la garde des bêtes sur les communaux, sarclage, accompagnement de l'attelage lors des labours et des hersages. Elle devait savoir tenir, sans selle, sur un cheval, comme tant d'enfants de paysans. Elevée par des parents pieux, Jeanne reçut de sa mère la connaissance des prières en langue vulgaire : Pater, Ave, symbole des apôtres, elle connaissait la morale du décalogue. Elle se confessait au curé de sa paroisse et communiait à Pâques. Elle entendit vraisemblablement quelques prêches de frères mendiants, aussi bien dans son enfance, en particulier en 1428 à Greux, qu'au cours de sa vie publique, et, fort intelligente, elle se souvint de remarques originales et sut aussi formuler ses propres réflexions. Les discussions avec son confesseur, l'augustin frère Pasquerel contribuèrent sans nul doute par la suite à lui forger le jugement. Sa piété devint de plus en plus sacramentelle (messes, confessions et communion) à mesure qu'elle prit de l'indépendance, pourquoi aurait-elle échappé au " foisonnement rituel " (formule de J. Chiffoleau) qui se manifeste presque partout à la même époque ?

Quant à savoir lire et écrire, la question est en suspens... Raisonnablement, on peut dire qu'elle a appris à signer son nom et lui seul, peut-être au cours de l'été 1429, et qu'elle ne devait point lire vraiment couramment. Intelligente, elle l'était, et dotée d'une bonne mémoire ; on sait que la mémoire des gens du Moyen Age était mieux aiguisée que la nôtre, cependant avec des rapports au temps et à l'espace très différents d'aujourd'hui, en raison de l'absence de cartes, de calendriers et de montres

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Message par Vive Dim 5 Mar 2017 - 15:46

C'est pas fini. Mais j'aime mieux faire lentement. Pour que ce soit lu et assimilé . L'épopée de Jeanne est dense.
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Message par Vive Jeu 9 Mar 2017 - 11:32

Enfance suite et fin

Pieuse et sérieuse, Jeanne était aussi une enfant normale : elle jouait, chantait et dansait, riait et pleurait comme les autres, les témoignages concordent, car elle demeura ainsi jusqu'au bout, émotive et réfléchie. Au moment du procès en nullité, il n'était pas question de faire de la jeune femme une sainte, les témoins ne furent pas ceux d'une canonisation, ils ne cherchèrent guère à la figer dans des attitudes prémonitoires d'une figure de vitrail. Elle était seulement une future héroïne. On nous la montre donc participant aux traditions villageoises, couronnes votives et danses, celles que les juges de Rouen cherchèrent à diaboliser et dont elle même ne fut aucunement dupe : elle n'a jamais vu les fées, ni cru en elles, pas plus qu'aux sources guérisseuses ou aux mandragores. G. Duby notait avec ironie qu'elle se révèle moins crédule que ses juges !

Cette enfant vécut cependant une expérience mystique, celle qui la conduisit à transgresser la retenue de son éducation, les usages des femmes, les cadres de la société. Cette audace fut justement celle des mystiques de son époque, de Catherine de Sienne à Marie Robine, de Marjorie Kemp à Colette de Corbie, autres femmes de décisions et d'actions, non militaires cependant. " C'est dans le jardin de son père " dit-elle à Rouen " qu'elle entendit un jour vers midi, une voix et vit une clarté ". Elle avait alors douze ou treize ans (elle était donc majeure) et eut très peur. Cette voix, ou plutôt, ces voix, car elle finira par mettre, au cours de son procès, le 27 février 1431, trois noms sur ces visions, ceux de l'archange Michel (protecteur du royaume de France), des saintes Catherine et Marguerite (alors des plus populaires, l'iconographie antérieure à Jeanne le prouve) lui ordonnèrent une mission à laquelle elle résista quatre ans. L'historien ne peut rien dire de cette expérience, quelles que soient ses propres opinions religieuses ou philosophiques, sinon qu'elle conduisit Jeanne à braver, dans la certitude, la cour du roi Charles et les chefs de guerre peu commodes, puis, dans la fermeté, les juges, docteurs en théologie et décret. Et elle tint bon, même si elle eut un instant de faiblesse et certainement beaucoup de douleur morale, jusqu'à la mort.

A l'écoute des enseignements que lui donnèrent peu à peu ce qu'elle a dit être ses conseils et ses gardes, elle finit par formuler les termes de sa mission, de la charge dont elle se sentait investie : secourir Orléans, faire sacrer Charles à Reims. Sans doute le second projet fut-il chronologiquement le premier, mais le siège d'Orléans fut l'événement qui la poussa à franchir le pas, à sortir de sa réserve, à braver le ridicule et l'opposition des siens, d'autant que la pression des Bourguignons se faisait de plus en plus pesante sur les îlots de résistance du Barrois.


Jeanne finit par oser parler à Robert de Baudricourt, capitaine armagnac de Vaucouleurs, en mai 1428 ; cette première fois, comme le souligne P. Duparc, il ne pouvait être question d'Orléans, mais sans doute de la protection que Dieu - disait-elle - accorderait au dauphin Charles, seul vrai roi de France. Une seconde entrevue, méprisante de la part du capitaine, eut lieu au début de l'hiver (novembre ?). Quelques semaines plus tard, le capitaine se montrait moins ironique et surtout moins sceptique. Jeanne précisait ses projets : aller elle-même en France et s'adresser au dauphin. Elle parlait aussi de la prophétie, que bien des gens connaissaient, prédisant qu'une vierge des marches de Lorraine sauverait le royaume perdu par une femme.

Finalement, Baudricourt l'envoya d'abord auprès du duc de Lorraine et de René d'Anjou, duc de Bar, mais aussi époux de l'héritière de Lorraine et beau-frère de Charles VII. Jeanne s'y rendit vêtue en habit de cavalier, le premier habit d'homme de son histoire, cela ne semble pas avoir causé la moindre émotion ; elle n'obtint des princes que de bonnes paroles, un cheval et un peu d'argent... Alors qu'elle aurait voulu que René l'accompagnât en France. Mais cette expédition montre qu'elle avait réussi à se faire écouter de quelques personnes : un parent Durant Laxart, un bourgeois de Vaucouleurs, Jacques Alain, et la famille Le Royer qui l'hébergea. Baudricourt lui fournit une petite escorte, qui ne devait pas au départ avoir une véritable opinion sur la mission et la personne de Jeanne, les jeunes gens de ce groupe, Metz, Poulangy, firent ensuite des dépositions très favorables à celle qui était devenue pour eux une véritable héroïne. Le plus réticent à l'aventure fut Jacques d'Arc, il ne fut pas mis au courant du départ de sa fille pour Chinon, vers le 13 février 1429.


A partir du départ de Vaucouleurs, tout le monde connaît l'histoire : la chevauchée à travers la région bourguignonne du royaume, prudente, en grande partie de nuit et aux heures les moins fréquentées. Le trajet en est incertain dans ses détails quotidiens. Cependant il y eut trois étapes marquantes. A Auxerre ville hostile au roi "de Bourges", elle entendit la messe à la cathédrale - ce qui prouve qu'on pouvait circuler sans subir trop de contrôles. A Gien où son arrivée provoqua, semble-t-il, une rumeur qui parvint jusqu'à Orléans : une Pucelle assurait qu'elle libérerait Orléans et conduirait le dauphin à Reims ; enfin à Sainte-Catherine-de-Fierbois, sanctuaire miraculeux, particulièrement fréquenté par les chevaliers et hommes d'armes partisans du dauphin, et qui était orné d'ex-voto militaires. Elle y attendit la réponse de la cour à sa demande d'entretien.
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Message par Vive Jeu 9 Mar 2017 - 11:43

La rencontre avec le dauphin à Chinon (le 6 mars ?) est - elle aussi - une mine de controverses et de récits tendancieux. On discuta d'abord beaucoup à la cour pour savoir s'il fallait ou non la recevoir, la recommandation de Baudricourt fut peut-être déterminante. Mais aussi la curiosité et l'intérêt que pouvait susciter une femme inspirée, une prophétesse. Que le roi ait été reconnu par Jeanne n'a guère d'importance, le lui avait-on décrit, l'attitude des personnes présentes était-elle vraiment naturelle ? Le roi "tiré à part" n'en n'était-il pas d'autant plus reconnaissable ? Ensuite, le "secret" a provoqué des kilomètres d'écritures contradictoires et enfiévrées. Jeanne a su dire au Dauphin les phrases qui ont persuadé celui-ci que sa cause n'était pas perdue. Récemment B. Guenée, quand il dit que la mission de Jeanne était d'ôter au Dauphin le remord de n'avoir pas agi en roi en laissant assassiner Jean-sans-Peur, paraît avancer une hypothèse des plus plausibles : Dieu avait pardonné, c'est ce que Jeanne allait prouver par la libération d'Orléans. Un témoin du procès en nullité (le duc d'Alençon) rappela que Jeanne aurait dit à Charles : " le roi des cieux, vous fait savoir par moi d'aller à Reims pour être sacré et couronné, et pour être le lieutenant du roi des cieux qui est roi de France ", le projet de Dieu rendait au dauphin son aptitude à régner.

Acceptée près du roi, la jeune fille reçut une garde autant que des serviteur ; tels Louis de Coutes, le page, et Jean d'Aulon, chargé de l'intendance. Tous ceux qui, placés auprès d'elle, purent ou voulurent bien témoigner ensuite sur son comportement, n'eurent qu'un souvenir de piété, de grande franchise et de décision. Il y eut, on le sait, enquêtes sur sa virginité, sur sa personne et sa foi. A Poitiers, où le roi était venu pour une session du Parlement, Jeanne fut interrogée par des théologiens, tout -ou partie- des comptes-rendus en furent connus des juges de Rouen puis des universitaires parisiens, mais ils sont perdus. Les interrogatoires portèrent essentiellement sur le caractère orthodoxe de la foi de la jeune fille : la conclusion fut qu'en elle il n'y avait nihil fidei catholice contrarium, rien de contraire à la foi catholique.

Alors commença l'épopée militaire. Jeanne menait-elle une guerre juste ?. P. Contamine a montré que la question agitait déjà les esprits du vivant de la Pucelle : Jean Dupuy en 1429 rappelle que sa cause est juste "à savoir la restitution du roi à son royaume et l'expulsion ou l'écrasement très juste d'ennemis très obstinés" ; d'autres, avant le procès en nullité, ont cherché à distinguer si le fait de se dire "chef de guerre" était de la part de la Pucelle compatible avec une véritable mission divine. Ses partisans l'affirmèrent, ses détracteurs l'accusèrent de cruauté, et même de meurtre (c'est l'affaire de l'exécution de Franquet d'Arras).

Le roi accepta que Jeanne, armée d'une épée prise à Sainte-Catherine-de-Fierbois et avec un étendard personnel reçu à Tours, accompagnât les vivres et renforts envoyés à Orléans. Elle était elle même une partie de ce soutien qui arrivait à un moment désespéré et les hommes d'armes ne le comprirent pas autrement au début. Il est assez évident, par le témoignage même du bâtard d'Orléans, que tout d'abord les seigneurs spécialistes de la guerre ne voyaient pas en elle autre chose qu'une présence qui pouvait être favorable, une sorte de talisman dont on verrait bien s'il était efficace. Elle avait annoncé sa venue aux Anglais par une lettre apportée par des hérauts royaux, leur enjoignant de lever le siège, missive à laquelle ils avaient répondu par des injures transmises par un des messagers. On sait que le voyage vers Orléans fut assez difficile, avec une partie des troupes restées à Blois. De Meung à Jargeau, toutes les villes étaient aux mains des Anglais, 3500 d'entre eux encerclaient la capitale ducale. La seule voie d'accès était la route de l'est car le corps de ville continuait à espérer une médiation des Bourguignons qui occupaient avec Jean de la Trémouillele château de Sully. L'entrevue du 29 avril au soir, avec Jean le bâtard d'Orléans qui, depuis son passage à Gien, était tenu au courant de ce que faisait la jeune fille et vint à sa rencontre, débuta fort mal : "le conseil de mon seigneur est plus sage que le vôtre" dit Jeanne tout à trac au Lieutenant général du roi au fait de la guerre. Que le vent change de sens et permette aux bateaux qui portaient les vivres d'entrer dans la ville, que la petite troupe de la Pucelle et de ses hôtes orléanais passe sans encombre devant les lignes anglaises à Saint-Loup firent que Jean à son tour fut convaincu : "de ce jour, je mis en elle bon espoir et plus encore qu'auparavant".
Tous les Orléanais connaissent les étapes du séjour de Jeanne, logée dans une des plus grandes maisons de la ville, celle du trésorier ducal, Jacques Boucher. Elle passa les premiers jours dans l'attente des troupes venant de Blois, allant à la messe, aux vêpres, à la procession de l'Invention de la croix, fête de la cathédrale, et réitérant aux assiégeants anglais, par message et par oral, l'ordre de quitter leurs positions. Quand, le 4 mai, arriva l'armée royale, accueillie par Jeanne et le Bâtard, l'ennemi ne bougea pas, l'armée put entrer en ville. Les chefs de guerre, réunis chez Guillaume Cousinot, le chancelier ducal, ne consultèrent pas la Pucelle pour aller attaquer, dès l'après-midi, la première bastille, à Saint-Loup, preuve que sa seule présence dans la ville leur paraissait suffisamment efficace. Or, surgissant au moment où ils faiblissaient, elle leur montra que sa présence active était seule susceptible de faire changer la victoire de camp. Elle ne quittera plus pour quelques mois le petit noyau des capitaines royaux ceux dont les armes et les bannières ornent encore la ville le jour de la fête : Xaintrailles, la Hire, Boussac, Gilles de Laval ( ou de Rais...), et plus tard, Jean d'Alençon, Athur de Richemont..

Le 5 mai, elle envoie une troisième missives. Le 6 mai elle est, avec la Hire à ses côtés, aux Augustins, d'où les Anglais sont expulsés. Le 7 elle est présente tout au long de l'assaut des Tourelles, elle est blessée, et au soir, les Tourelles, porte d'entrée du pont qui franchissant la Loire mène à la ville, sont enlevées. Le pont, coupé depuis sept mois, retrouve ses fonctions - par des moyens de fortune - pour que l'on aille chanter un Te Deum. Le lendemain les Anglais, d'abord rangés en bataille, s'en vont en bon ordre. La Pucelle remplace le bout de conduite que les soldats vainqueurs étaient tout disposés à faire par un retour en procession et une messe pour les morts. C'était un dimanche, jour de la fête de saint Michel au mont Gargan, l'archange et envers lequel les rois de France avaient une dévotion particulière, rival du saint Georges des Anglais. La procession fut aussi la première célébration de la fête de la délivrance, aujourd'hui la plus ancienne liturgie civique de France.
La véracité de la parole de Jeanne était éclatante pour les partisans du roi Charles : elle avait accompli, en dépit des réticences de l'entourage royal et des capitaines, une partie de ce qu'elle avait annoncé. Pour beaucoup, et en particulier pour le roi et ses proches, responsables d'un royaume, fut-il seulement "de Bourges", était-ce suffisant ? Jeanne dut partir à la poursuite du roi à Loches, à Selles-sur-Cher, pour le persuader de se rendre à Reims.
Les troupes royales entreprirent d'abord de libérer les villes de la Loire que les Anglais avaient prises les unes après les autres afin d'encercler Orléans : au début de juin Jargeau (12 juin), Meung (le 16 juin), Beaugency (le 17 juin) sont reprises, toujours avec la présence active de la Pucelle, alors qu'affluent les troupes qui rejoignent une armée qui renoue avec la victoire : le duc d'Alençon, le connétable Arthur de Richemont amènent des hommes. Le 18 juin, à Patay les Anglais, menés par John Talbot et Fastalff, sont écrasés, leur chef fait prisonnier. C'est une confirmation de la validité de la parole de Jeanne. C'est aussi l'occasion pour les témoins de remarquer la grande humanité de la jeune fille envers les blessés de tous bords et son absence d'esprit de vengeance. Par cette victoire, elle peut alors, après une ultime discussion des chefs de guerre, obtenir le départ pour Reims, ville tenue par un parti Bourguignon et que l'on ne pouvait rejoindre qu'en traversant le pays ennemi.
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Message par Vive Jeu 9 Mar 2017 - 13:25

Jeanne obstinée et impatiente- Jeanne prisonnière

La relative facilité du voyage vers Reims surprit les contemporains ; les villes semblaient céder sans peine. En réalité, elles eurent des réactions différentes. Auxerre acheta sa tranquillité, ce qu'on pourrait appeler un "patis", avec des vivres. Troyes, à laquelle la Pucelle avait écrit, était partagée entre le désir de résistance de la garnison anglo-bourguignonne et la peur des bourgeois qui resteraient seuls devant l'armée royale, si les gens de Bedford et de Philippe le Bon décidaient de lever le camp. Les Troyens envoyèrent frère Richard à Jeanne. Il avait en son temps été la coqueluche de la population parisienne qui courait à ses sermons, sa rencontre avec la Pucelle en fit un inconditionnel "Armagnac", selon le Bourgeois de Paris. Les gens de la ville ne cédèrent que devant la menace d'un siège. L'armée s'était arrêtée cinq jours devant Troyes (5-10 juillet). Châlons envoya au devant du roi les clefs de la ville (13 juillet) ; les autorités de Reims, à la réception de la lettre envoyée par leur archevêque Regnault de Chartres qui tenait pour le dauphin, envoyèrent leurs clefs en demandant une garantie de non-représailles.
Le 17 juillet, lendemain de l'entrée royale, ce fut le sacre. Une cérémonie avec les moyens du moment : un rituel( ordo) conservé sur place, aucune des regalia (objets royaux symboliques) de Saint-Denis bien évidemment remplacés par des pièces du trésor archiépiscopal, et des pairs du royaume représentés par des fidèles du roi, de fort moindre naissance. Cependant les onctions furent bien faites avec le chrême de la sainte ampoule apportée de l'abbaye de Saint-Remy et c'est l'onction qui fait du roi de France l'oint du Seigneur, le vrai souverain du royaume. Le duc de Lorraine et René d'Anjou ne s'y trompèrent pas et firent le déplacement. La présence de l'étendard et de Jeanne à la cérémonie, en bonne place, est une des images les plus fortes de l'iconographie de l'héroïne, sans doute longtemps non exempte d'arrière-pensées de propagande politique.

Sur les événements qui vinrent après Reims, les historiens commencent à se diviser, et l'histoire de la Pucelle à connaître des zones d'ombres. En fait, elle a accompli ce qu'elle avait au départ déclaré être la mission ordonnée par ses voix. Elle n'avait donc plus, en théorie, de raison de continuer à insister auprès du roi pour aller de l'avant contre les Anglo-Bourguignons. Cependant, elle était assez lucide pour voir que tant que Paris était aux mains des Anglais et que la ville restait favorable aux Bourguignons, le roi, tout sacré qu'il était, ne tiendrait pas en mains toutes les rênes du pouvoir. Il fallait donc prendre Paris. Mais le roi et le duc de Bourgogne préférèrent jurer des trêves. Le premier pour ne pas être amené à aggraver par une conquête violente la très mauvaise opinion de lui qu'avait une bonne partie de la population au nord de la Loire et en particulier la haine que lui vouait une partie de l'élite demeurée à Paris, le second pour prendre le temps d'examiner la situation et se concerter avec Bedford, régent pour Henri VI. On sait que le duc Philippe le Bon mena un subtil jeu entre Bedford et Charles VII, afin, dans un premier temps, de reprendre pied à Paris, dont la garnison devint essentiellement bourguignonne, et ensuite de soutirer de l'argent au régent.


L'élan militaire fut brisé, il n'est pas certain qu'à ce moment là Charles VII en ait été attristé. L'opinion que beaucoup ont eu sur Charles VII a été curieusement influencée d'abord par la propagande bourguignonne, et beaucoup plus tard par les républicains puis les nationalistes jusqu'au-boutistes. On fait un versatile d'un souverain obstiné, un homme sous influence d'un souverain qui lâcha ses favoris quand ceux-ci le desservaient et un émotif d'un père glacial. On a beaucoup trop joué de lectures primaires du portrait du souverain par Fouquet. Le but du roi est de détacher, par les trêves, puis la paix, les Bourguignons des Anglais, de tourner la guerre et les combats vers les seuls étrangers et de ménager, au contraire, ses vassaux rebelles et leurs sujets, de façon à recouvrer, plus par la persuasion que la force, la plénitude du pouvoir sur l'ensemble du royaume. Il faut retrouver l'amour des sujets et non susciter leur rancœur. Dut-on en passer par le sacrifice de ne point reprendre immédiatement Paris, et se contenter de mener des expéditions peu coûteuses, ici et là, contre des chefs de bande (Perrinet Gressart à la Charité, entre autres).

La campagne royale de l'été 1429 montre comment le roi souhaita se montrer et ne pas affronter directement les Bourguignons et, de même, comment Bedford préféra battre la campagne plutôt que de livrer bataille (à Crépy-en-Valois, les 15 et 16 août), les deux attitudes sont tout à fait comparables. Jeanne n'est évidement pas au conseil royal, elle ne l'a jamais été, et s'impatiente des tours et détours entre Soissons, Provins, Senlis et Paris. L'échec d'une tentative de Jeanne, avec le duc d'Alençon, sur la porte Saint-Honoré (8 septembre 1429) provoqua l'arrêt de la campagne militaire. Jeanne remis alors à Saint-Denis un de ses équipement de guerre en gratitude d'une blessure non mortelle. Puis ce fut le départ de l'armée royale qui fut dissoute à Gien le 21 septembre. Bien certainement, Charles jugeait que désormais, il était le maître de la situation, Dieu l'avait secouru, et Jeanne ne lui était plus nécessaire. Il mettrait le temps qu'il faudrait - il fallut six années - mais ferait la paix avec la Bourgogne, sans l'avoir humiliée militairement, et pourrait ensuite reprendre, avec un royaume tout entier derrière lui, les campagnes victorieuses contre Henri VI.
Le roi n a jamais expliqué à la Pucelle quels étaient ses projets, pas plus que ne le firent ses conseillers ; elle ne pouvait pas comprendre seule que le temps des rois n'est pas toujours celui de l'urgence, alors qu'elle même avait peut-être la prescience, ou la certitude, de la brève échéance de sa mort. Il est certain qu'elle commençait à agacer le souverain, et son entourage. Aucun prophète n'est facile à cotoyer. Pendant l'automne et l'hiver de trêves, on l'envoya à Saint-Pierre-le-Moutiers (novembre), qu'elle reprit avec vaillance, et à La Charité, ce qui fut un semi échec dont elle reconnut qu'elle y était partie sur ordre des hommes et non de Dieu. Elle ne sut pas interpréter le message, fort biaisé sans doute, de l'entrevue avec Catherine de la Rochelle, qui défendait le point de vue des trêves. Cette femme n'était pas, comme Jeanne, une vraie mystique et elle ne pouvait donc pas en être comprise, puisqu'elle n'était, sans doute, qu'une simple porte-parole de l'entourage du roi. Ceux-ci, avec l'incurable morgue des gens bien-nés, crurent qu'il fallait envoyer à une " simple fille ", une fille plus simple encore, laquelle fut rembarrée de belle façon. Dans un sens, il semble que la cour de Charles VII, et le roi lui-même, n'aient plus su trouver un langage pour parler avec Jeanne. Â Mehun-sur-Yêvre, en décembre 1429, on anoblit sa famille.
La Pucelle cherche donc à faire oeuvre utile pour le royaume et pour la chrétienté : elle a déjà, en juillet 1429, évoqué la lutte contre les Sarrasins. En mars 1430, obéissant sans doute à Pasquerel, elle fera écrire aux hussites ces hérétiques de Bohème révoltés, semblables aux maures sarraceni similes. Mais, elle ne démord pas cependant de chasser d'abord les Anglais et leurs alliés. Aussi, quand les trêves vinrent à terme, à la fin de mars 1430, Jeanne, retrouvant une utilité aux yeux des capitaines et du chancelier, prit l'initiative de repartir en campagne. Ce fut la dernière, puisqu'elle fut prise, le 23 mai 1430, dans des conditions sujettes à longues discussions, devant les portes de Compiègne, menacée par les Bourguignons, dont elle était sortie pour faire une "grant escarmouche au bout du pont". Le Picard qui la saisit la revendit à Jean de Luxembourg, celui-ci la mena dans ses terres et, comme pour tous les prisonniers de valeur, compta en tirer le meilleur profit, financier et politique. Pourquoi ne put-elle pas revenir dans la ville, avait-on fermé les vantaux, y avait-il si " grande presse ", les gens des portes prirent-ils peur, fut-elle trahie - et pourquoi ? - par Guillaume de Flavy, capitaine de la ville, fut-ce de la part de ce dernier, une maladresse, un propos délibéré. Il n'est plus guère possible de répondre aujourd'hui.
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Message par Vive Ven 10 Mar 2017 - 0:39

Jeanne vendue à jean de Luxembourg après la défaite à compiegne- jean la vend aux anglais.

Le temps de la captivité se divise en deux périodes : le séjour aux mains de Luxembourg et le temps de Rouen. La première époque paraît presque trop belle, en comparaison avec la seconde, mais elle n'est pas des plus explicite : bien traitée, Jeanne fut l'objet de la sollicitude de la famille de son détenteur, des dames charitables auprès desquelles elle passa l'été, de juin à septembre octobre 1430, au château de Beaurevoir. On lui offrit des vêtements féminins. Le séjour dans les forteresses des Luxembourg est intéressant autant par l'ignorance vraie qu'on en a que par le peu qui en a filtré. Les seules certitudes sont les deux tentatives d'évasion. Les juges, plus tard, essayèrent de lui faire avouer qu'elle avait voulu mourir ; elle tenta de leur faire comprendre sa douleur d'être incapable de venir au secours des gens de Compiègne assiégés, de son désir de les secourir, puis, pour la seconde tentative, de sa peur de l'arrivée des Anglais, qui allaient l'emmener ailleurs en captivité. Il peut paraître assez évident d'éprouver le désir de s'évader : à plusieurs reprises elle dira que si la porte restait ouverte, elle s'enfuirait et ne voulut jamais promettre de ne rien essayer. D'autre part, il faut se rappeler que sainte Catherine est une sainte de la délivrance miraculeuse des soldats capturés. Les miracles de Sainte-Catherine-de-Fierbois sont, essentiellement, des récits de gens d'armes captifs, qui sautent des tours, ou des murs, se relèvent sans encombre, de prisonniers dont les portes s'ouvrent, comme la prison de saint Pierre, et qui passent sans être vus a travers les lignes ennemies. Ce sont les armes de ces soldats libérés par leurs prières qui pendaient par dizaines dans le sanctuaire tourangeau. Il est plus que vraisemblable que Jeanne, nourrie de ces récits, avant même le début de ses campagnes, ait voulu croire que ses saintes accompliraient pour elle un semblable miracle.

Le rachat de la Pucelle par les Anglais, longuement négocié, est encore un point troublant : le roi Charles VII n'aurait-il pas pu donner plus et la racheter ? Deux questions : l'a-t-il tenté ? Jean de Luxembourg se serait-il laisser fléchir ? Aucune preuve n'est assurée de négociations, même simplement amorcée, de la part des Français. Etait-ce parce qu'on savait d'avance que la cause était perdue ? D'un autre côté il semble que Jean de Luxembourg, totalement à ce moment là dans la clientèle de Philippe de Bourgogne, n'eut sans doute pas l'intention de choisir son acheteur, il attendit seulement le temps nécessaire pour faire monter la somme à une hauteur raisonnable pour une si belle prise, de six à dix mille francs. Le prix n'était pas exorbitant, comme le souligne G. Duby.
Le roi Charles savait qu'il ne pourrait racheter la Pucelle, il fit donc payer, si l'on peut dire, la livraison de Jeanne par les ravages en Bourgogne et Champagne, en dégageant Compiègne et en ne relâchant pas la pression sur les Anglais auxquels rien ne réussissait depuis la levée du siège d'Orléans. Mais il n'y eut pas de tentatives militaires pour délivrer la jeune fille...
Entre novembre et la fin du mois de décembre 1430, Jeanne est transférée, avec discrétion, jusqu'à Rouen, où l'attendent quelques clercs, universitaires et membres de la hiérarchie qui depuis sa capture ont commencé à réclamer une mise en jugement et à monter les chefs d'accusation.

Depuis six mois, de subtils théologiens, à l'initiative de l'Université de Paris et de l'évêque de Beauvais - en exil à Rouen - Pierre Cauchon, ont échafaudé les arguments sur lesquels faire trébucher une jeune fille peu habituée au maniement des concepts et de la dialectique. Le procès fut ouvert le 21 février 1431, il avait été précédé d'une enquête dans la châtellenie de Vaucouleurs, donnant peu de témoignage en défaveur de la Pucelle, si ce n'est le confus souvenir d'une promesse de mariage rompue. En revanche, l'argumentaire était fin prêt, et contrairement à ce que l'on pourrait croire, il était loin de considérer Jeanne comme quantité négligeable et de se contenter d'écraser sous des formules difficiles une pauvre et simple fille. Les juges étaient persuadés avoir affaire à un personnage dangereux, parce que vraisemblablement soutenu par des forces occultes, diaboliques. Ils allaient se confronter à un personnage politiquement néfaste à une cause pour laquelle ils avaient délibérément opté depuis parfois près de vingt ans, celle des Bourguignons puis des Anglais. Enfin il avaient devant eux une rebelle, insoumise à l'Église militante, ou ce qu'ils considéraient comme telle, c'est-à-dire eux-mêmes. Les juges et leurs assesseurs, par roulement une centaine de personnes, menèrent un procès d'inquisition en forme, prenant toutes les précautions et multipliant les avis et consultations, parce que la cause était, en matière de discipline et de théologie, très importante. Il poussèrent au bout un procès politique, crucial parce qu'il s'agissait d'atteindre, par delà la Pucelle, l'adversaire qu'elle avait réussi à faire sacrer à Reims. Il osèrent un procès inique, enfin, parce qu'ils n'envisagèrent guère que Jeanne put finir autrement que condamnée et brûlée.
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Jeanne d'arc - Vie et procès d'une toute jeune fille Empty Re: Jeanne d'arc - Vie et procès d'une toute jeune fille

Message par Vive Ven 10 Mar 2017 - 0:54

Procès - cédille

Les documents subsistants du procès de condamnation montrent avec éclat la qualité de l'intelligence de la jeune fille, ainsi que les limites, naturelles étant données son origine et son éducation, de l'expression de ses intuitions. On y lit les capacités de réflexion qu'elle développa au cours des séances, et l'héroïsme des décisions auxquelles elle parvint, seule, sans conseils autres que ceux qui l'avaient accompagnés depuis le début de son aventure et qui sont du domaine du mystère. En face, on peut lire l'entêtement de théologiens et de juristes in utroque, qui rencontrèrent plus de résistance, de répartie, de profondeur qu'ils ne croyaient, qui y trouvèrent la preuve du bien-fondé de leur acharnement et qui, faisant flèche de tout bois, allèrent jusqu'à la ruse pour écraser cet être si dangereux, une mystique de dix-neuf ans.
Jeanne, fut interrogée, si l'on résume, sur quatre points fondamentaux (A. Bossuat), les voix, le " signe " du roi, les habits d'homme, la soumission à l'église militante. Presque jusqu'au bout, la Pucelle résista sur la certitude de sa révélation : c'est de Dieu qu'elle tient ses conseils, que viennent ses voix qui lui disent " son fait " (c'est une autre façon de dire sa mission). Les juges tentèrent, et réussirent parfois à la pousser sur des chemins dangereux : la matérialité des voix, les signes, le culte de lâtrie (d'adoration), la personnalisation des trois saints, la réalité physique d'un signe royal (la couronne), le goût des chevaux et des vêtements, et, bien sûr, les habits d'homme... Jeanne, cependant, par la franchise de certaines réparties accula à son tour ses juges se découvrir et à montrer plus de crédulité, plus de " simplesse " qu'elle même. Elle riait de la mandragore, des fées ou de la nudité de saint Michel. Elle usa d'allégories que les juges ne voulurent pas comprendre. L'ange à la couronne en était une : elle-même était venue, messagère de Dieu, apporter sa royauté à Charles. Elle annonça sa libération, nous y lisons sa mort, les juges l'intervention souhaitée du diable. A toutes les questions retorses elle opposa sa confiance inébranlable en Dieu (" Dieu premier servi ! "), la nécessité absolue de faire ce qui lui fut dit. Ce qui lui fut dit était que Charles devait être sacré et que les Anglais devraient repartir en Angleterre. Ces affirmations exaspérèrent particulièrement les juges qui y voyaient la négation du rôle de la structure ecclésiastique comme médiateur entre Dieu et les croyants. Jeanne ignorait le sens du terme Église militante, encore plus si les juges disaient qu'ils étaient cette Église et qu'elle n'en n'était pas, elle qui avait tant travaillé pour Dieu. Par ailleurs la Pucelle continuait à réclamer avec constance le secours de l'église dans ses sacrements, que sans pitié, voire avec sadisme, ses juges lui refusèrent obstinément.

D'interrogatoires secrets en séances publiques, le procès s'achemina vers une condamnation, à partir de soixante-dix articles sur lesquels Jeanne eut à répondre, regroupés en douze qu'on ne lui aurait vraisemblablement pas proposés tels quels. Nous savons que certains assesseurs ont eu des doutes sur la culpabilité, et aussi sur la procédure : ne faudrait-il pas recourir au pape ? Là-dessus, Jeanne était d'accord. C'était pour les juges une démarche qui risquait de les désavouer, on l'éluda. Mais ce fut plus tard un des arguments qui emportèrent sa canonisation.

Les 18 avril et 2 mai, des " monitions " furent faites à la prisonnière pour la convaincre, le 9 mai, on la menaça de torture. L'avis de l'université de Paris - consultée - parvint à Rouen le 14 mai 1431, il était net : Jeanne était schismatique, dans l'erreur en matière de foi, apostate, menteuse et divinatrice. Le 23 mai on lut devant la prisonnière le texte de l'université, accompagné de commentaires d'une grande violence, suivi d'une admonestation adoucie et d'une convocation à une séance publique au cimetière de Rouen.
La journée du jeudi 24 mai est une des clefs de l'histoire de Jeanne : après une résistance de plus de trois mois, une fermeté sans faiblesse, elle signa, d'un rond puis d'une croix, une cédule. Celle qui fut montrée et publiée est une cédule d'abjuration où elle reconnaissait avoir " feint mensongèrement avoir eu révélation de par Dieu et ses anges, saintes Catherine et Marguerite ". Le texte fait dans les copies une cinquantaine de lignes environ. Le curé-doyen et huissier Jean Massieu, qui a lu publiquement la cédule à la foule, soutiendra toujours, quand le vent eut tourné, qu'elle faisait six-huit lignes. Nous ne saurons jamais la formule exacte que Jeanne signa, en tout état de cause elle pourrait avoir abjuré moins que ce qu'on lui prêta ensuite. Mais cette abjuration lui évitait la mort et personne n'était satisfait : les Anglais étaient furieux de ne pouvoir frapper davantage le parti de Charles et de laisser à ses partisans la figure emblématique de la Pucelle, les juges étaient embarrassés d'avoir ouvert une porte à la clémence, pourtant en toute légalité et charité chrétienne, et la jeune fille fut désespérée d'avoir renié ce qui l'avait mue depuis des années.
L'habit d'homme ne fut que le prétexte pour rattraper toutes ces insatisfactions. Revenue dans la prison, aux mains des Anglais, habillée en femme, obligée peut-être faute d'autres, de remettre ses vêtements masculins (G. Peyronnet), Jeanne revenait sur ses déclarations le lundi 28 mai : ses conseils lui avaient dit de reprendre ses habits, tant qu'elle ne serait pas dans une prison ecclésiastique surveillée par des femmes. Elle réaffirmait tenir de Dieu sa mission et qu'elle serait damnée si elle niait cette révélation.
Le 29 mai les juges, ayant délibéré sur les derniers événements, décrétèrent que Jeanne devait être " réputée hérétique et laissée à la justice séculière en priant cette justice qu'elle la traitât plus doucement qu'elle n'avait mérité ".
Au Vieux-Marché, le 30 mai, en présence de Jeanne, la sentence traditionnelle fut lue : " comme membre pourri nous t'avons déboutée et rejetée de l'unité de l'Eglise et t'avons déclarée à la justice séculière ". Les juges partirent, et le bailli anglais, sans procéder au moindre jugement ni délibérer sur la peine, la fit mettre sur le bûcher. Ses cendres furent, on le sait, jetées en Seine.
C'est en novembre 1431 que furent terminées les rédactions et les copies du procès de condamnation.
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